ÉCONOMIE

La Confédération nationale des buralistes de France sanctionnée par l’Autorité de la concurrence

La Confédération nationale des buralistes de France sanctionnée par l’Autorité de la concurrence
Publié le 29/09/2023 à 16:49

La représentante des détaillants de tabac écope d’une amende de 750 000 euros pour pratique anticoncurrentielle, après avoir organisé des opérations de boycott à l’égard de la FDJ en 2016.

Le couperet est tombé : dans sa décision du 26 septembre 2023, l'Autorité de la Concurrence a administré une amende de 750 000 euros à la Confédération nationale des buralistes de France (CNBF) pour des pratiques jugées contraires à la libre concurrence.

Au centre de cette (ancienne) querelle entre la Française des jeux (FDJ) et la CNBF, la diversification des canaux de vente des jeux de hasard, après que la FDJ avait cherché à collaborer avec des fleuristes. Principal opérateur de jeux de hasard en France, les buralistes étaient historiquement les distributeurs privilégiés de ses jeux : toutefois, afin d’étoffer l’accessibilité à ses produits, la FDJ avait en effet envisagé un partenariat avec le réseau Florajet. Un possible partenariat vigoureusement contesté par la CNBF, la représentante des buralistes craignant une concurrence directe et une perte d'influence dans la distribution des jeux de hasard.

En réponse, dès la fin août 2016, la CNBF avait ainsi largement communiqué sur le fait qu’elle organiserait des opérations de boycott. Ces dernièrement visaient ainsi la validation de l’EuroMillions, le 27 septembre 2016, et de plusieurs jeux en ligne (Loto, Loto sportif et EuroMillions), le jeudi 22 septembre 2016.

Des pratiques d’une « particulière gravité »

Dans sa toute récente décision, l'Autorité de la Concurrence établit que les pratiques mises en œuvre sont bien constitutives, au regard du droit de la concurrence, d’ententes. « La CNBF a clairement pris position faveur d’une ‘action très dure contre la FDJ’, mentionnant la nécessité de ‘planter leur nouveau jeu, qui sort courant septembre’ », développe-t-elle. La décision pointe en outre que « le président de la CNBF ne s’en est pas distancié publiquement, indiquant même : ‘les initiatives locales ne me gênent pas’ ». Au sens de la jurisprudence, peut-on lire, cette complicité constitue ainsi un « mode passif de participation » à l’infraction qui est donc de nature à engager la responsabilité de l’entreprise.

Par ailleurs, quant au caractère anticoncurrentiel, la Cour précise que si la pratique et la jurisprudence définissent le boycott comme « une action délibérée en vue d’évincer un opérateur du marché ». Or, sur ce point, « l’intention de la CNBF de faire obstacle à la distribution de jeux de la FDJ par le réseau de fleuristes sous enseigne Florajet est manifeste », affirme-t-elle, tout en précisant que le fait que les effets escomptés du boycott se soient ou non matérialisés n’a pas de d’impact, avant de conclure au caractère  anticoncurrentiel du blocus organisé par la CNBF.  

Dans sa décision, l’Autorité, qui en profite pour rappeler qu’elle peut « infliger des sanctions proportionnées à la gravité des faits reprochés, à la durée de l'infraction, à la situation de l’entreprise ou du groupe auquel elle appartient, et à l’éventuelle réitération de pratiques anticoncurrentielles », met en exergue la « gravité particulière de ces pratiques de boycott mises en œuvre par une instance syndicale ». Elle souligne également à ce titre la durée de ce blocus, particulièrement préjudiciable, puisque l’infraction a été mise en œuvre du 23 août 2016 au 27 septembre 2016.

L’Autorité ordonne également la publication, sur la page d’accueil de son site internet et dans une lettre d’information adressée aux adhérents de la CNBF, d’un résumé de sa décision, « afin d’informer les buralistes du caractère prohibé des pratiques sanctionnées » dans cette affaire.

La FDJ chercher à rester compétitive

L'amende infligée à la CNBF souligne l'importance de respecter loyalement l’émergence de concurrents inédits. Plus largement, l’affaire indique aux entreprises le poids d’une innovation (revoir son réseau de distribution) pour satisfaire aux attentes des clients. Les acteurs d’un secteur doivent se transformer pour progresser sur leur marché.

Les buralistes, grands distributeurs des jeux de la FDJ, se sont manifestés contre un partenariat, craignant une perte de position dans la vente des jeux de hasard. Quel que soit le commerce, ce comportement interroge sur l'adaptation des acteurs historiques aux évolutions des modèles de distribution changeant au gré des habitudes de consommation.

L'intervention de l’Autorité de la concurrence a permis de maintenir un environnement de concurrence équitable dans le secteur des jeux de hasard. Ce secteur est fortement réglementé et encadré par l'État. La FDJ bénéficie d’un monopole sur plusieurs jeux emblématiques, mais, ces dernières années, d’autres sociétés de jeux sont apparues, notamment en ligne, entrainant une concurrence accrue. C’est dans ce contexte que la FDJ cherche logiquement des voies d’amélioration pour rester compétitive.

Bérengère Margaritelli

Florian Coing-Daguet

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